 |
Vient le temps de la Libération proprement dite.
Ailleurs la guerre continue. Toulouse et le département, isolés,
coupés de l'extérieur, sont désormais sous le contrôle
des seules forces de la Résistance intérieure. Des inquiétudes
naissent en différents milieux sur sa réelle volonté révolutionnaire.
Elles remontent jusqu'à l'entourage direct du Général
De Gaulle. On exagère l'importance et le nombre d'excès,
d'ailleurs difficilement évitables. Une espèce de « Grande
Peur » gagne les esprits et la légende, tenace, de « la
République rouge de Toulouse » naît dans ce contexte.
Tout ceci doit être nuancé et relativisé. Les
rapports de force n'assurent pas la prépondérance des éléments
les plus communisants, même si ceux? ci occupent parfois
des postes? clefs. C'est toute la Résistance qui témoigne
alors d'une volonté progressiste mais en ayant le souci majeur
de n'accomplir rien d'irréparable et de préserver
la légalité. Très vite un décalage apparaît
entre le discours et la réalité, entre le dire et le
fait. Fidèle au programme du C.N.R., la Résistance toulousaine
garde le langage « révolutionnaire » de la clandestinité mais,
dans les semaines qui suivent la Libération, alors qu'elle contrôle
une région isolée où tout est théoriquement
possible, elle consacre l'essentiel de ses efforts à tenter
de résoudre les difficiles problèmes conjoncturels du
moment : le ravitaillement, les transports, l'épuration, la
mise en place des nouveaux rouages administratifs et judiciaires..
. , sans parler des impératifs suscités par la poursuite
de la guerre. C'est là que se situent sa Force et sa Faiblesse.
Sa Force parce qu'elle réussit, dans des conditions difficiles, à éviter
le vide du pouvoir, à restaurer les grandes Libertés, à promouvoir
un nouvel ordre démocratique, à maintenir l'activité,
tout en amorçant un certain nombre de réformes économiques
et sociales, en responsabilisant un peu plus les travailleurs,
en jetant les bases d'un « monde nouveau »... Sa Faiblesse,
parce que, malgré des résultats honorables, elle ne résoudra
pas les problèmes de l'heure, s'y enlisera, y perdra une partie
de son ardeur et de son dynamisme. Désenchantement ou mécontentement
vont grandir. Rivalités de personnes et conflits de pouvoir
vont surgir au grand jour. Le voyage du Général de Gaulle à Toulouse
(16 septembre 1944) met un terme aux ambiguïtés et aux
illusions. Il est attendu avec beaucoup d'espoirs. Mais, mal informé voire
prévenu contre la Résistance toulousaine, il traite avec
condescendance certains de ses responsables, conforte l'autorité des
représentants directs de l'Etat ? Préfets et Commissaire
de la République ? amorce un processus qui ira en s'accentuant
par la suite : celui de l'affaiblissement des idées et surtout
des pouvoirs de la Résistance locale qui avaient été légitimés
jusqu'ici par les luttes de la clandestinité. |
 |