A des lieues à la ronde, on connut vite leurs campements. Pour­tant quand les Allemands, informés par des traîtres, survenaient pour attaquer, les huttes étaient vides, les granges abandonnées. Un gamin, suant sur son guidon, avait donné l'alarme et, sur la piste même, à deux pas du but, un bûcheron ou un gardien de bestiaux, jurait encore que le bois ne cachait personne. Tout le pays était complice...

Dès lors, de SaintÅ]Gaudens à Cazères, les destructions n'arrêtè­rent plus. A peine les Allemands avaientÅ]ils réparé, que la dynamite parlait ailleurs. Pylones abattus, rails déboulonnés, aiguillages détruits. En quelques semaines, la ligne PauÅ]Toulouse fut à peu près impraticable : plus de munitions de Tarbes, plus d'explosifs, plus de benzol, plus de matériel d'Espagne...

Mais si le chemin de fer fonctionnait de mal en pis, les usines de guerre continuaient à tourner, expédiant leurs produits par camions. Entre autres celles de Boussens, qui fournissaient à la Wehrmacht de l'huile de graissage et des produits chimiques. Cela ne pouvait durer. Un soir, les Maquisards envahirent la plus impor­tante de ces raffineries et, ayant éloigné le personnel, firent sauter les chaudières et mirent le feu aux bacs. Le ciel fut rouge toute la nuit...

En repartant, ces soldats de l'ombre, dont quelquesÅ]uns étaient masqués, avaient promis de revenir : ils tinrent parole. Plus une semaine ne s'écoula sans que l'usine fut saccagée...

Un an plus tôt, avec une mitrailleuse devant la porte de l'usine et des patrouilles le long des chemins de fer, l'ennemi serait venu à bout de cette poignée de braves. Maintenant, il ne pouvait plus, il était débordé. C'est sur toutes les voies et dans toutes les usines qu'il eût fallu des troupes. Le jour appartenait encore au Boches, mais les nuits étaient aux maquis... ».

(Vacances Forcées, Editions Albin Miche!, 1985).

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